lundi 11 mai 2009

Week-end Invisible Children à Guadalajara

Chose promise, chose due: voici un petit compte rendu du week-end que j'ai passé à Guadalajara il y a de cela deux semaines. De l'eau a coulé sous les ponts depuis lors (ma couleur de cheveux a changé et le clavier de mon pc possède désormais une touche Ñ...tout fout le camp, eh oui ma ptite dame!), mais bon voilà, j'avais quand même envie de vous donner un petit aperçu de cette fin de semaine mémorable.

Si vous suivez régulièrement mes péripéties, vous vous souvenez peut-être qu'il y a six semaines, Álvaro et moi avions hébergé cinq Américains membres de l'association Invisible Children, association dont le but est de mettre fin à la guerre qui sévit en Ouganda depuis maintenant 23 ans et, surtout, à l'abduction d'enfants-soldats. Nous avions alors décidé de faire le déplacement à Guadalajara un mois plus tard, pour manifester, et nous l'avons fait.

Álvaro n'a finalement pas pu venir, et jusqu'au dernier moment j'ai cru que je devrais manifester toute seule, mais j'ai finalement rencontré Fer dans la file d'attente des toilettes de la gare routière de Guadalajara et bref, j'ai fini par passer le week-end avec lui et son pote, étant donné que mon hôte potentiel ne répondait pas au téléphone. C'est en compagnie de Enrique, l'ami de Fer qui nous a hébergés, et de sa copine Deborah, que nous nous sommes rendus au point de rendez-vous, non sans avoir auparavant pris et imprimé à plusieurs exemplaires ces trois magniphotofiques photos:


Bon sang, moi qui me trouvais bronzée... J'ai vraiment l'air d'une merde de laitier à côté de ces trois basanés. On va dire que la photo est surexposée, hein. Le mec dont j'envie le teint de pain d'épice, à côté de moi, c'est mon pote Fer, vous le connaissez déjà, et ensuite vous avez Enrique - Quique pour les amis...et on ne rit pas, c'est pas de sa faute -, puis Debbie.





Chacun de nous était censé apporter trois photos de lui entouré de sa famille ou de ses amis, et nous devions encercler de rouge notre visage et poster ces photos avec les lettres que nous écririons aux autorités compétentes: la personne entourée de rouge symbolisait l'enfant ougandais enlevé à sa famille. Oui, je sais, dit comme ça, ça peut sembler un peu cucul.

Nous nous sommes donc pointés au lieu de rassemblement, et là surprise: Fer et moi étions les deux seuls débiles à porter le t-shirt officiel de la manifestation, vert militaire avec un AK47, acheté exprès sur internet. Tous les autres portaient un t-shirt blanc qui avait été spécialement dessiné par le groupe de Guadalajara pour l'occasion. Ah. Et tous des ados, issus de la même école...bon, ben on faisait tache, mais après tout on s'en foutait, nos t-shirts à nous étaient plus cools, d'abord.

Nous étions environ 250, et nous sommes tous partis en direction du lieu où nous serions sequestrés; car oui, c'était bien là le but. Les enfants ougandais sont enlevés à leurs familles et forcés à entrer dans l'armée de Joseph Kony: eh bien nous, nous nous séquestrerions nous-mêmes, dans l'attente que des leaders politiques et culturels viennent nous libérer. Je sens le petit sourire narquois fleurir sur vos lèvres... Oh allez, ne soyez pas si cyniques! L'idée était d'attirer l'attention des médias et, étant donné que l'évènement devait avoir lieu dans plus de 100 villes de 6 ou 7 pays, ça promettait quand même d'avoir de la gueule.

Notre petite bande d'enthousiastes a déplié les couvertures et sorti le pot de Nutella (oui, bon, fallait bien survivre, hein), et nous nous sommes installés pour faire le siège jusqu'à l'aube s'il le fallait, plus probablement jusqu'à 1h. du matin, heure programmée par le groupe de Guadalajara. Et le cirque a pu commencer.

Un jeune type avec un micro nous a fait des discours à la con sur "la situation en Afrique" (comme si l'Afrique était un putain de pays), puis nous avons tous revu l'excellent film disponible à cette adresse: http://therescue.invisiblechildren.com/en/#/watch/. Puis nous ont été distribués des feuilles de papier, des crayons et des adresses, et nous avons eu comme consigne d'écrire une lettre à...euh... ben à l'ONU, entre autres, je crois, pour demander aux autorités compétentes qu'elles fassent leur possible pour mettre fin à cette guerre. "Personnalisez votre lettre", qu'on nous a dit, "mettez-y ce que vous ressentez". Euh...ah, bon, ok. J'ai regardé Quique, Deborah et Fer écrire les leurs pendant que l'inspiration ne me venait absolument pas, et j'ai fini par pondre une lamentable merde sirupeuse. Et ça se prétend licenciée ès lettres...la honte.

Voici Fer, qui tire exprès une tronche dramatique pour l'occasion, avec son chef-d'oeuvre. Allez, je vous traduis ça: "Salut :). Puisque l'indignation ne suffit pas pour être une impulsion du changement, je me trouve à des kilomètres de ma ville avec la ferme intention que ma voix se transforme en un acte de justice. Je vous demande, à vous qui avez ce pouvoir d'execution (d'action), que ma voix ne se perde pas dans le vide, que les enfants d'Ouganda récupèrent leur liberté!" Ouais, il a le sens de la formule jolie et qui fait mouche, je suis jalouse.

Nous avons ensuite introduit nos lettres dans des enveloppes avec nos photos et mis le tout dans une boîte qui a été, je l'espère, remise à qui de droit.

Est venue ensuite la phase chiante de l'opération: les leaders culturels sont venus nous sauver, ouééé. Quelques pouffes siliconées sont venues dire que la guerre, c'était mal (j'exagère un peu, hein), puis un groupe de gamins gominés, pas plus âgés que 12 ou 13 ans, est monté sur scène pour chanter son dernier tube. Ouh-là, ça décoiffe! "Allez viens, monte sur ma moto, je t'emmène..." Un grand moment de musique.

Les organisateurs sont ensuite passés dans les rangs pour récolter un peu de thune...et puis plus rien. "Voilà, nous avons été libérés!" Hein?? Il n'était que 21h15, aucune personnalité politique n'avait pointé le bout de son nez et nous n'avions vu qu'une seule journaliste prendre des notes. C'est tout?? J'étais bien déçue. Il faut dire que depuis des semaines, nous recevions sans cesse des mails d'encouragement et d'information de la part du QG de l'association, à San Diego, et nous y croyions vraiment. Enfin...moi en tout cas. Aux Etats-Unis, c'est sûr que tout a pris bien plus d'ampleur, des milliers de manifestants dans chaque ville, et la leader culturelle de Chicago, c'est Oprah Winfrey, pas une bande de gamins prépubères. Guadalajara, c'est quand même la seconde ville du Mexique, je m'attendais donc à quelque chose d'un peu plus grand; mais d'après ce que j'ai compris, les Mexicains ne sont pas habitués à manifester.

Voici le t-shirt que tout le monde portait: "Je suis un otage, viens au sauvetage, le 25 avril 2009". Et j'ai appris un nouveau mot, "rehén", chouette.
Nous sommes repartis aigris et déçus (enfin surtout moi), Nutella et couvertures sous le bras, et sommes allés nous acheter des bières, que nous avons bues tous les trois (sans Deborah) en restant éveillés jusqu'à l'aube, comme c'était prévu depuis le départ, sur la terrasse de Quique. Nous n'aurons certes pas sauvé le monde, mais nous nous serons au moins bien marrés, le week-end était sauf, et moi j'ai eu un nouveau coup de foudre amical.

N'empêche qu'en matière de manifestation, on peut dire que celle-ci a fait un petit bide. Qu'importe, c'était une expérience intéressante, et l'intention y était. On verra quelles répercussions tout ça aura eu. En tout cas, moi j'ai appris une chose: vouloir sauver le monde et organiser une grande manif remplie d'actes symboliques, ça peut être grandiose quand des milliers de gens se réunissent, quand la foule vous galvanise; mais c'est juste gentiment ridicule quand vous n'êtes qu'une poignée de types en t-shirts blancs (ou vert kaki) qui écrivez des letttres assis parterre. Et c'est bien dommage.

Quelques photos en vrac:


Pour coller avec le t-shirt, il fallait le casque...

Après quelques courtes heures de sommeil, nous nous sommes réveillés avec une grosse flemme une et avons passé la journée...sur la terrasse, à ne rien faire. Fer et moi sommes ensuite rentrés à Aguas et avons trouvé notre ville ravagée par la peste...euh! la grippe, pardon.

Ci-dessous, voici une "torta ahogada". Une torta, c'est une espèce de sandwich que l'on mange dans toute la république, et la spécialité de Guadalajara, c'est de la manger "noyée", c'est-à-dire littéralement recouverte de sauce piquante.






Cette chaise-hamac est un piège redoutable. Je VEUX la même quand j'aurai une terrasse.
Là je ne tirais pas la gueule, j'étais juste à deux doigts de m'endormir.






Et sinon, Aguascalientes c'est fini pour moi...pour le moment, du moins. Demain après-midi part mon bus pour Morelia, où je vais passer deux ou trois jours avant de m'armer de patience et de descendre, lentement, jusqu'à Cancún, où arrivera ma maman dimanche prochain. Mon sac est fait, j'ai dit au revoir à tout le monde, mais j'ai du mal à réaliser que je vais quitter la ville dans laquelle j'ai vécu ces quatre derniers mois. En fait, je ne peux pas envisager que ce départ soit définitif, et peut-être que...qui sait...sans doute...

5 commentaires:

Elise a dit…

...que ce n'est ps un adieu, mais un au revoir... S'attacher... s'arracher... Il me semble que cela me dit qqch...

Cool que Marlyse puisse venir, la grippe porcine ne vous aura pas (on en parle encore, d'aillleurs ? J'ai l'impression que ça se tasse). Profitez bien !

Bises.

Nath a dit…

Ca n'est certainement pas un adieu, je pensais de toute façon repasser par Aguascalientes avant de quitter (dans longtemps) le pays, pour saluer tout le monde. Mais là il est probable que... Bon, je vous en dirai plus bientôt, je ne veux pas vendre la peau de l'ours.

Pour la grippe, en effet, elle ne nous aura pas eu. On en parle encore, mais beaucoup moins, les écoles ont réouvert et les gens se refont la bise. C'est parti aussi vite que c'est arrivé!

Elise a dit…

...il est probable que quoi ?!...

- tu te maries avec un beau Mexicain ?!
- tu vas faire carrière comme prof de français au Mexique ?

"dans longtemps", c'est quoi ? quelques semaines ? mois ? années ?!

Quoi qu'il en soit, on viendra te voir ;) !!

Lutinvengeur a dit…

Oui avec toi on ne sait jamais.... mais si tu es toujours dans les parages, je viendrai également, question de juger de la qualité de ton espagnol ;-)

Elise a dit…

Héhéhé j'avais deviné ;)) !
Prof de français au Mexique !!
Excellente expérience en perspective ! Comme quoi, le "hasard" nous réserve toujours de bien belles surprise, au final.

Profite de ta maman, sinon !
On viendra tous au Mexique en 2010 ;) ! On commence déjà à économiser !

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