jeudi 2 octobre 2008

Ca y est, c'est officiel, je HAIS Greyhound!

Le bus que je devais prendre pour Chihuahua partait à 20h30 de Flagstaff; je me suis donc présentée une heure avant au terminal de Greyhound. Ces endroits sont propres et bien éclairés, mais je ne m'y sens jamais à l'aise. Les terminaux de bus représentent une bonne partie de ce que je n'aime pas dans le voyage, et je m'y sens toujours inexplicablement sale. Dans celui-ci, il y avait plusieurs machines bruyantes alignées le long du mur, des jeux vidéo d'où provenaient des bruits de coup de feu tandis que trois très jeunes enfants jouaient à se tirer dessus, sous le regard morne de leurs parents mexicains. Un homme dormait, assis sur un banc, tandis qu'un autre était carrément vautré au milieu de la fille d'attente, parterre. Et nous attendions. Heureusement, j'avais mon bouquin pour passer le temps et m'évader de cette glauquitude; malheureusement, le passage que j'étais en train de lire était encore bien plus glauque que la réalité de ce terminal de Greyhound: le narrateur racontait comment il avait décroché de l'héroïne, en passant par deux semaines d'insupportables douleurs et angoisses. * Nous avons finalement embarqué dand le bus, contournant le type couché parterre, alors que des membres de la sécurité lui répétaient qu'il ne pouvait pas dormir là. Dans le bus, j'ai à nouveau ressenti cette impression de ne pas vraiment être à ma place; et les néons blafards, reflétant mon visage ennuyé sur la vitre totalement obscure ne contribuaient pas à rendre le lieu plus accueillant. Ce genre de lieu et de circonstance n'a aucun impact sur moi quand je voyage accompagnée: déjà à deux, on se crée sa bulle, confortablement remplie de la familiarité du langage de l'autre et de son aspect. Seule, je suis plus vulnérable. Ce soir-là, avec mon bouquin rempli de meurtres, de tortures et de peurs, dans cet environnement peu accueillant, je pouvais entrevoir, comme par une porte légèrement entr'ouverte, ce que la vie peut être: un long calvaire peuplé d'angoisse, de haine et de folie. Je suis bien dans ma peau, et j'ai la chance de vivre une vie confortable et facile; je peux ainsi facilement rester du bon côté de l'existence et éviter de regarder dans cet abîme que je refuse de sonder, même lorsque, solitaire, je croise le regard vide d'un junkie (ouais, c'est presque de la poésie, là!); il n'empêche, je me réjouissais d'être enfin à Chihuahua, dans l'appartement de ce Koko, couchsurfer que je ne connaissais ni d'Eve ni d'Adam.

Dans le bus, j'ai eu une discussion intéressante avec un Jamaïcain qui avait vécu dans plusieurs pays d'Afrique et aux Etats-Unis, et qui a ouvert de grands yeux quand il a appris que je dormais généralement entourée d'inconnus et que ça ne me dérangeait pas. Maintenant il veut trouver un moyen de venir travailler en Suisse, mais j'ai essayé de le décourager en lui disant que c'était difficile et que je n'allais pas l'épouser. Après un bref somme contre la vitre d'un noir d'encre, nous sommes arrivés à Albuquerque, Nouveau-Mexique, où nous avons été priés de descendre le temps que...euh...finalement je ne sais même pas pourquoi on a dû descendre. Après une heure d'attente dans un autre glauquissime terminal de bus, j'ai tendu l'oreille lorsqu'une employée à appelé dans le micro un nom qui sonnait vaguement comme le mien, quelque chose comme « Nat'lie Veil is waited at the ticket desk ». C'était bien moi qu'on appelait. La nana, une Mexicaine, m'a dit que j'aurais dû étiqueter mon sac à dos, dans la soute, puis m'a informée que mon bus était parti. Quoi? Mais tous les autres passager étaient encore dans le hall... Oui, mais moi j'aurais dû changer de bus, c'est la compagnie Autobuses Americanos qui dessert les destinations mexicaines. Youpie. C'est gentil de m'avoir prévenue, hein. J'ai obtenu de pouvoir retourner dans le Greyhound pour prendre mes affaires, que j'avais évidemment laissées, et je suis retournée lui demander, abandonnant l'anglais pour switcher à l'espagnol, quand partait le bus suivant: à 13h le lendemain. Bon. Il était presque 5h du matin, j'avais faim et sommeil, et je me suis juré que je ferais dorénavant de plus petites étapes. Il est absolument hors de question que je me retape un long voyage en bus, surtout la nuit, si je peux l'éviter! J'ai songé à me trouver un motel pour dormir quelques heures...mais le rapport prix/sommeil était quand même trop élevé; je suis donc restée assise dans ce terminal, à lire à côté d'un type qui bâillait interminablement pendant que je tentais de rester éveillée. CNN diffusait en boucle, jusqu'à la nausée, les débats autour des présidentielles, et des distributeurs de gadgets peinturlurés de couleurs criardes clignotaient près du fast food: une bien sympathique dernière image des USA.

Heureusement, le matin n'a pas tardé à arriver, amenant avec lui un soleil accueillant et des idées un poil plus claires. J'ai décidé d'attendre jusqu'au bus de trois heures du matin qui, lui au moins, arriverait à Chihuahua vers midi et non pas en pleine nuit...je ne peux quand même pas débarquer chez mon hôte couchsurfer à 2h, ça ne se fait pas tellement. J'ai donc arpenté la ville à la recherche du visitor center, celui-ci étant fermé, j'ai demandé aux gens dans la rue où je pouvais trouver une auberge, et j'ai enfin débarqué à l'hostel "Route 66" situé, ben oui, sur mythique route 66. Bon, de ce côté-ci je suis un peu blasée, j'avais déjà roulé sur cette même route à Flagstaff, alors... L'auberge est heureusement très accueillante, et j'ai presque songé à y rester une nuit de plus. Mais ça suffit, je veux aller au Mexique, maintenant! Je vais donc devoir mettre le réveil pour attraper le bus de 3h10, cette nuit. Ou alors celui de 4h40...pour ce que ça change, hein...

J'ai quand même pris quelques photos.

Je suis aller zoner à l'aquarium- jardin botanique, histoire de m'occuper. C'est situé dans la vieille ville...qui a l'air tout aussi jeune que le reste d'Albuquerque. D'ailleurs, Albuquerque, pour votre culture, se prononce approximativement "Albakeurcoui", mais je n'ai pas réussi à le dire sans me ridiculiser.



De l'herbe de pampa, comme on en avait dans le jardin, à la route de Chancy (Elise, Anne-Marie et Sandra s'en souviennent peut-être). Séquence souvenir. C'est très beau, mais quand on secoue les plumeaux - ce que les petites filles adoooorent faire - ça fout des poils/plumes dans toute la maison - ce que les mamans n'apprécient que moyennement. Quand je serai grande, j'en aurai plein dans mon jardin.
Bon, et ça c'est une fontaine.


* Le bouquin, c'est « Shantaram », par Gregory David Roberts. Ce type, l'auteur, s'est évadé d'une prison australienne dans les années 80 et a atterri à Bombay, où il est tombé amoureux, a vécu dans un bidonville, a ouvert une clinique gratuite et a été enrôlé dans la mafia locale. Absolument passionnant, je vous conseille vivement de le lire – bon, il fait 950 pages, faut s'accrocher -, et en anglais si possible, ça en vaut la peine rien que parce qu'il est impossible de traduire l'anglais rigolo des Indiens.

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